dimanche 16 mars 2008

Ainsi parla Z.

Il y a un certain nombre d'années, alors que j'étais étudiant, je partageais un appart avec un coloc féru de musique classique ... et aussi de cuisine. Si son attrait pour ce type de musique n'était absolument pas gênant, celui pour la cuisine était tout simplement passionnant ! Mais je m'égare.
Par une soirée studieuse, et sans doute maussade, -ceci explique cela-, alors que j'étais seul, je me décidais à écouter quelques-unes de ses œuvres classiques, dont je ne connaissais absolument rien.
Tout en travaillant, je mis donc quelques-uns des vinyls 33 tours de mon coloc sur la platine. Le dernier fut le célèbre "Ainsi parlait Zarathoustra", de Richard Strauss, tiré du livre de Nietzsche –ça c'était écrit sur la pochette-.
Ce fut alors le retour du coloc.
Me voyant travailler aux sons de ce merveilleux poème symphonique, il se figea d'indignation, puis stoppa net le disque, et devant mon regard éberlué, se fâcha tout net. Si, si !
Il se lança dans une explication très technique, et certainement très intéressante, sur ce que j'étais en train d'écouter, et surtout le contexte dans lequel je le faisais. Dans un premier temps, il me reprocha mon manque de recueillement et de concentration à l'écoute de cette œuvre sublime. Cela devait être écouté SANS AUTRE DISTRACTION–je me rappelle encore les majuscules- .
Puis il m'expliqua la complémentarité entre le concept et la musique, le rendu par la musique de la pensée du surhomme, la splendide superficialité de l'art de Strauss, la dichotomie entre la nature et l'esprit, …
Désolé, mais je n'ai pas tout retenu et j'ai du effectué quelques recherches pour me rappeler tout cela. Bien sûr, c'est sans doute dommage. Mais à l'époque, je n'eus pas honte -et maintenant pas plus d'ailleurs- d'avoir écouté cela SIMPLEMENT et d'avoir trouvé cela beau. Bref d'avoir aimé tout simplement. Tout l'arrière-plan littéraire, la structure musicale, m'étaient et me sont encore parfaitement inconnus, et même incompréhensibles. Mais j'avais aimé la musique.
Quel besoin avais-je d'analyser, de philosopher longuement sur le pourquoi et le comment, pour apprécier ?
Lorsque j'écoute un morceau de musique, pas seulement classique, lorsque j'observe une peinture, lorsque je lis un texte, lorsque j'assiste à un spectacle, je peux tout à fait être conquis, ravi, enchanté, emballé, admiratif, sublimé, sans pour autant avoir le goût et l'envie de décortiquer, d'expliquer, de disséquer, d'analyser, de théoriser, même de commenter.

Sans doute cette anecdote fut-elle partiellement responsable de ma toujours complète ignorance en matière de ... musique classique ?