mardi 15 décembre 2009

Atelier d'écriture (2)

Tu sais parfaitement où tu es. Mais pas vraiment pourquoi.
Pour écrire ? Oui, un atelier d'écriture, c'est ça. Pour recommencer à écrire. A écrire autre chose que des petites notes sur un coin de cahier, que des messages griffonnés dans un carnet à spirales, que personne n'a jamais lus, ne lira jamais. Même pas toi. Mais pourtant tu n'y crois pas vraiment.
Tu t'installes, assis loin de la table, jambes croisées haut. Pour marquer une certaine distance. Que tu n'es pas encore prêt. Tu observes les autres, nonchalamment, presque par hasard. En fait, tu les dévisages. Tu te demandes ce qu'ils ont en commun avec toi. Ils savent parfaitement où ils sont. Et aussi pourquoi.
Ils sont détendus, prêts, motivés. Ils jouent avec leur stylo, ou le coin de leur feuille, ou utilisent le premier pour dessiner sur le deuxième. L'animateur. Souriant, presque trop jovial.
Tu n'y crois pas. Tu veux te lever, partir vite, oublier tout ça, l'écriture, l'encre noire, le papier blanc. Tu veux partir sans un mot, avant même qu'ils te connaissent, avant même qu'ils t'écoutent, qu'ils te lisent. Mais tu ne bouges pas. Tu cherches des yeux un truc, un objet, un élément indétectable du décor. Pour y fixer ton regard, pour faire semblant d'être ailleurs.

L'exercice est simple. Se présenter, par écrit, par un jeu d'écrit. Acrostiche. Tu sais bien, chaque lettre de ton prénom commence une phrase. Tu as si souvent joué à ça. Quand tu cherchais l'inspiration. Ou juste le plaisir du crayon qui glisse sur le papier. Le plaisir de noircir une page blanche. Le plaisir d'écrire ?
Tu vois les lettres qui s'assemblent, les mots qui se forment. Tu vois ta main qui se meut prestement devant toi. Ta main qui tient le stylo. Le stylo qui court légèrement sur le papier. Tu es attablé, comme les autres. Tu es penché au-dessus de la table, comme les autres. Tu écris, comme les autres.
L'exercice était facile. Amusant. Tu relèves la tête. Tu souris. Tu te relâches. Content de toi. Tu vas lire ton texte. Devant les autres. Pour les autres. Et pour toi.

Deux heures ont passé. Ou deux jours. Libération. Tu as écrit des fragments de ta vie, tu as livré des fragments de ton intimité. A des inconnus. Le partage a fonctionné.
L'écriture a fonctionné.


lundi 2 novembre 2009

Il y a toujours un mur quelque part

Le mur d'Hadrien, la muraille de Chine, le mur de l'Atlantique, le mur de Berlin, le mur des lamentations, le mur israëlo-palestinien, le mur frontière US-Mexico ...

Peut-on aujourd'hui célébrer le démantèlement du mur de Berlin, alors qu'il y a encore ça :

entre USA et Mexique
 
entre Israel et Palestine


Nous sommes tous en prison, mets-toi bien ça dans la tête !
Chacun est face à sa muraille et le temps n'est pas assez long pour que nous parvenions à la détruire tout à fait.
Certains s'y essayent, à leur façon. Face à face, pierre par pierre, ou à coup de bulldozer, contre ce mur si épais, contre ces fondations si profondes, contre cette habitude si forte de contempler ce mur au centre de notre paysage !
Certains font demi-tour, et le monde parait vaste et libre à ceux-là, jusqu'à ce qu'ils se retrouvent à l'autre bout, car il y a un autre bout à tout. Et là, ils se heurtent à ... un mur ! Alors, ils crient, car ils réalisent que c'est le même mur.
    
Nous sommes tous encerclés, enfermés, enferrés, enlisés, enterrés, ensevelis.
Oui, tous.
Mais rares sont ceux qui le comprennent vraiment, alors chut ! Continuons à éviter soigneusement de nous cogner la tête.

Il est implanté à Paris, sur la butte Montmartre, place des Abbesses, dans le square Jehan Rictus.

samedi 31 octobre 2009

Balade souvenir

Marcher. Errer. Sans but, sans contrainte. Avancer, regarder, contempler, puis repartir ailleurs, plus loin.
Rues sombres de la vieille ville, passages obscurs, pierres grises. Parfois un rayon de soleil qui se faufile. Escaliers, portes voutées, détours, ruelles aveugles.
Je suis revenu dans le quartier ancien de Menton, autour de l'église St-Michel. J'avais vaguement, trop vaguement visité, traversé ces lieux il y a si longtemps. Sans rien voir.


On croise quelques visiteurs, au pas lent, au regard levé. Qui cherchent leur chemin, ou se laissent emporter, comme moi par les pavés de pierre. Portes fermées souvent, mais fenêtres ouvertes, appelant un soleil trop haut, trop rare, trop loin au-dessus des toits. Le linge sèche entre les façades, comme des pavillons, touches de couleurs au milieu du passé. Parfois une porte claque, un enfant rit, bruit sourd qui s'étouffe immédiatement.
La rue étroite débouche sur l'escalier. Descente vers la plage, vers la lumière. Dernière heure de la journée, le soleil abandonne mètre par mètre le sable. On se rhabille, on se prépare à rentrer, on ne se presse pas, on a le temps. Le beau temps.

lundi 28 septembre 2009

Le Cantou

Le Cantou, unité psycho-gériatrique de l'Arche, maison de de retraite médicalisée. Le Cantou, c'est 14 personnes atteints de la maladie d'Alzeimer, ou simplement désorientées.

C'est là que je vais chaque semaine raconter 2 ou 3 histoires, contes traditionnels, randonnée ou étiologique, devant un public attentif. J'y suis reconnu, accueilli, écouté pendant une vingtaine de minutes.

  • 20 minutes pendant lesquelles je tente de donner une autre couleur à leur séjour ici.
  • 20 minutes pendant lesquelles je parle, bouge, souris.
  • 20 minutes de grande attention, de partage mutuel.

Chacun manifeste à sa façon son contentement : un silence d'ange remplace ses râles permanents, ses yeux brillent comme ceux d'un enfant, son sourire béat ne s'éteint pas lorsque je me tais, ses mains applaudissent silencieusement.

Et moi je ne sais plus comment partir, comment les quitter, jusqu'à la semaine prochaine.

Qui fait l'expérience ? Qui profite le plus ? Qui a le plus besoin ? De connaitre autre chose, d'être ailleurs, pendant un instant.



mercredi 23 septembre 2009

Au temps pour moi

Emploi du temps
Caser des activités dans des cellules d'un tableau censé représenter une semaine, heure par heure, et … s'y tenir pour régir le rythme de la vie hebdomadaire, jour après jour.
Gestion des temps passés
Rendre compte des durées d'activités plus ou moins intenses sur un sujet, un projet, bref combien d'heures minutes secondes a-t-on "travaillé sur" et pourquoi ? Big Brother is organizing you, déjà, un peu !
Compte épargne temps
Ne prenez pas vos vacances, travaillez pendant les jours de relâche, et ce temps non utilisé à ne rien faire vous est comptabilisé –épargné, mis sur livret- pour pouvoir être utilisé un jour, peut-être, si –lorsque ?- la mauvaise habitude de vous tuer au boulot vous laissera de côté !!!
Temps réel
Tout en même temps. Maintenant et tout de suite, sans perdre un instemps, réaction sur le vif, pour être à l'heure, voire même en avance. Et bientôt dépassé !
Faire son temps
Ou pire avoir fait son temps, l'avoir utilisé, usé, dilapidé, pour …
Perte ou gain de temps...
Comme si … le temps était de l'argent. Si je perds du temps est-ce que je vivrais moins longtemps ? Ou l'inverse ?

On passe son temps à planifier -à tempter de planifier- son temps, pour avoir le temps de faire tout dans les temps. Et pourtemps, le temps est immobile, rien d'autre qu'un concept valué pour caractériser notre mouvement, notre dynamique, nos accélérations, nos arrêts –est-ce que le temps peut s'arrêter ?-. En fait, le temps n'existe pas, ne s'use pas, même si l'on s'en sert ! Hier n'est rien, et demain n'est pas encore. La seconde elle-même n'est qu'une élucubration physico-mathématique, quelques 9 millions de pulsations d'un atome de césium -et je simplifie, là-, autrement dit n'importe quoi à base de symboles, de chiffres, de nombres astronomiquement démesurés, qu'on ne maitrise même pas donc. Comment expliquer qu'on définit un "truc" qu'on n'arrive pas à mesurer par des mesures qu'on n'arrive pas à assimiler - à observer ?-.

On ne voit pas le temps passer, c'est sûr !

( Klein )

Temps mort !

mardi 11 août 2009

Souvenirs d'aujourd'hui



Deux livres, deux pays, deux souvenirs !
Deux livres qui parlent de guerre, de violence, d'extrémisme, d'obscurantisme....
Deux livres qui parlent de femmes.

Persepolis, de Marjane Satrapi. Que peut-on dire de plus après le succès du film d'animation ? Que la BD est prenante, parfois angoissante, et si vraie ! Que moi, fervent amateur de bande dessinée, je n'aime pas trop ce dessin-là, et que pourtant je suis resté scotché page après page, j'ai soutenu Marjane, j'ai eu peur avec elle, j'ai appris avec elle.

Singué Sabour, de Atiq Rahimi. Prix Goncourt 2008. Une écriture forte, saisissante même. Pas besoin de dessin, j'ai moi aussi touché la pierre de patience et j'ai moi aussi attendu son éclatement.
La femme expire.
L'homme inspire.
La femme ferme les yeux.
L'homme demeure les yeux égarés.

Iran, 1976 & 1994. Deux voyages espacés de près de 20 ans. Première visite pendant les années du shah. Traversée en voiture -5 personnes à bord d'une 504 familiale-. Souvenirs assez vagues, beaucoup de routes, asphalte et poussière, beaucoup de camions, de postes de police, quelques arrêts typiques, la mosquée de Mashad que les étrangers ne visitent pas, les embouteillages de Teheran, le fou de Babol qui fouette les voitures qui entrent dans la ville, les turquoises invisibles de Neshabur, la mer Caspienne trop salée, où les filles se baignent tout habillé.

Deuxième voyage pendant le gouvernement islamiste. Se méfier des barbus, surtout des barbus qui se sont rasé … la barbe! US GO HOME gravé sur le mur dans le plus grand hotel de touristes américains de Teheran. Les voiles, les femmes en noir, longue robe cachant leurs jeans délavés. Le palais d'été du shah devenu musée, pour démontrer les frasques ruineuses de l'ancien président. Le musée des tapis à Teheran, magnifique et hors du monde.

Afghanistan, 1976. Suite et bout du voyage précité. Chaud toujours, désertique souvent, sauvage partout. La route du sud à partir de Herat. La route du centre vers le bleu irréaliste des lacs Band-Y-Amir, la route du Nord à travers une vallée interdite (aux touristes non accompagnés). Kabul, l'auberge Les Cavaliers où l'on dort sur la pelouse, les Russes au pouvoir et ça se voit, une paire de bottes en vrai loup des montagnes (mon esprit ecolo d'aujourd'hui les regrette un peu il est vrai), les chadris des femmes, les femmes qu'on ne regarde pas.


Les Buddhas d'Afghanistan en 1976,
en pleine restauration,
bien avant d'être définitivement
"talibanisés" !


Marjane, Atiq, merci à vous !


vendredi 17 juillet 2009

Mots Dits (*)


Pour moi, on ne décide pas d’être conteur.
C’est l’oreille des autres qui nous fait conteur.
On vous écoute.
Vous parlez, donc vous êtes conteur.
Deuxième définition, mais je ne parle que pour moi.
Il y a de nombreuses manières d’être conteur. Ma manière serait d’être un serviteur. Je me considère, dans cette partie de mes activités qu’est le conte, comme un serviteur non pas d’une tradition, mais d’un certain nombre de textes qui viennent d’infiniment loin, de plus loin que moi et qui, je l’espère, vont plus loin que moi. Je me définis comme un maillon d’une chaîne. J’ai le devoir d’être un maillon aussi solide que possible, donc de nourrir ce maillon qui est l’instant où je raconte une histoire, d’autant de vie que possible. Un conteur nourrit un conte de sa propre vie, de ce qu’il est, de ses expériences, de son talent, de sa capacité de transmettre quelque chose qui est de l’ordre du non-dit et de l’indicible.

Lorsque nous lisons ou écoutons un conte, nous suivons le chemin que le conteur avait lui-même tracé. Lorsque nous nous proposons de raconter l'histoire à notre tour, il nous reste à inventer un chemin nouveau, unique : le nôtre. En effet, le rôle d’un conteur n’est pas de transmettre les versions des conteurs précédents. Il est plus ambitieux et plus risqué que celui du lecteur, du récitant, de l’enseignant ou de l’historien : proposer sa version du conte qu’il a choisi. Pour le conteur, l'appropriation d'un conte consiste bien en une découverte, un défrichage lent et aventureux, afin d'y ouvrir un chemin qui lui ressemble : construire le souvenir d'une histoire qui lui serait arrivée, ou dont il se propose d’être à son tour le témoin.

Henri Gougaud

* oui je sais, facile, déjà utilisé de multiples fois, mais je ne m'en lasse pas !!!

vendredi 3 juillet 2009

Parler

Silence ! Quelques instants.

Parler. Enfin ! Chuchoter d'abord. Puis plus fort, plus ferme, plus haut.

Parler encore. Se délecter de son parler. S'immerger dans ses propres paroles. Mais aussi donner, exprimer, expulser les mots. Jusqu'à l'autre.

Parler sans cesse. Dire, ou ne rien dire. Laisser les mots voler, courir, se faufiler, puis s'évanouir, là-bas. Pour faire naitre et vivre d'autres mots.

Parler, partager, échanger. Une histoire contre un regard, yeux brillants, sourire béat. Une histoire contre un sourire, respiration haletante, esprit tendu.

Parler encore et encore … jusqu'au silence final !


C'était samedi soir au café-brasserie Les Ursulines, à Crémieu !


vendredi 29 mai 2009

Se coucher tard ... nuit !

(Raymond Devos)


La nuit, je dors.
La nuit je dors. Et je rêve.
La nuit, je rêve.
La nuit je rêve. Que je pleure.
La nuit, je pleure.
La nuit je pleure. Et ça me réveille.

La nuit, JE NE DORS PLUS.



...

vendredi 15 mai 2009

Une voix

Tu l'as entendue maintes fois à la radio, parfois vue à la télé, régulièrement lu son nom dans les pages de tes journaux. Tu connais sa voix, tu adores sa voix. Tu ne sais rien d'elle, ni la couleur de ses yeux, ni la rondeur de ses formes. Rien de son look vestimentaire, de ses habitudes, de ses manies, de ses envies. Tu ignores ce qu'elle aime manger, boire, écouter, regarder. La même musique que toi ? Les mêmes lectures, les mêmes goûts culturels ou artistiques ou sportifs ou ... ?
Mais tu aimes sa voix depuis ... si longtemps que tu la reconnais au moindre souffle. Au moindre halètement ! Au moindre sourire !

"Tout s'entend, la voix mouillée, la voix qui tremble, celle qui sourit, qui réclame. Les plaintes les plus lointaines sont inscrites dans la voix." (extrait de La sagesse d'une femme de radio, par Kriss, coédition Oeil-Neuf / France Inter)

Mais qui existe vraiment derrière cette voix ? Comment savoir ?

Attendre. Prendre place patiemment devant la porte du studio, à l'heure où l'émission se termine, en espérant ... que l'émission soit en direct ? qu'il n'y ait pas trop de portes ? qu'elle passe par là ? qu'elle te regarde ? oh ! à peine un coup d'oeil, juste curieux ou simplement vague, encore embrumé par la concentration professionnelle, un regard qui transpercera le pauvre admirateur transparent que tu es, un regard vers un point derrière toi, à des milllions d'années lumières de ton petit ego. Et toi immobile et tremblant, muet et stupéfait, bref , adorateur et paralysé, tu resteras là ... juste là où il faut ... juste là où tu es le plus transparent.

Ecrire. Une lettre, un petit mot, un email. Ecrire ton adoration, ton plaisir à l'écouter, ton désir de la rencontrer. Ecrire, mais autre chose que quelques mots bidon, niais et indignes. Ecrire, ta plus belle écriture, ta plus belle lettre, ta plus belle envie ! Une lettre, quelques phrases, des mots parmi des millions de lettres, de phrases et de mots.

"Ecrire et attendre, what else ?" (réplique de G.Clooney, attendant son café devant la porte du studio, à l'heure où l'émission se termine)

(à suivre ...)

mercredi 29 avril 2009

Découvertes


Un lieu : le café associatif Les Xanthines, rue de Condé à Lyon.

Une artiste : Julie Digard, peintre-photographe et d'autres choses encore.

Et un vernissage réussi.

Qui m'a permis de conter, ce que je n'avais pas fait depuis quelque mois, depuis un changement de poste délicat, difficile voire même désastreux !
Qui m'a bouffé du temps, du temps et encore du temps !
Qui m'a empéché d'écrire, de conter, de retrouver la toute petite infime particule naissante de ... zen ... qui avait semblé faire son apparition là-bas tout au fond de l'extrémité de la caverne de mon esprit, il y a si longtemps !!!

Un conte, un groupe de danse de rue qui s'y accroche pour démarrer leur spectacle improvisé ou presque, un public charmant (charmé ?), une relance, un renouveau minuscule, un embryon de semblant de "ça va mieux". Le goût qui revient, les sensations de partage, d'échange qui avaient disparu depuis ... tant de temps, tant de tant, un petit quelque chose de meilleur. Ailleurs !

Allez, pas d'hésitation, faites un détour :
Les Xanthines ou Julie Digard
ou la video du vernissage

Et puis si vous avez un peu de temps ...

lundi 13 avril 2009

Une bouffée d'optimisme


Peut-on
imaginer
plus
optimiste
que ... ça ?


lu sur un mur
au musée Beaubourg



samedi 11 avril 2009

Sans fin

(exercice d'atelier, la longue phrase : une histoire en une seule phrase)

Ce soir, après avoir fait l'amour, longuement, je l'ai laissée alanguie, endormie dans le grand lit défait, tandis que moi, assis dans le fauteuil près de la fenêtre, dans cette chambre d'hôtel, moi, nu, un verre de whisky à la main, je pense à nous deux, à notre rencontre, à ma stupéfaction lorsque j'ai compris, pas seulement que je la désirais, mais aussi que c'était elle dont j'avais toujours rêvée, elle que j'avais toujours cherchée, et que je venais de trouver, simplement, ce soir-là, dans un bar, et dont le sourire, surtout, me fit comprendre que j'avais raison, que ma quête venait de prendre fin avec elle, si belle que tous les hommes se retournent sur nous, sur elle, si intelligente, que toutes les conversations s'arrêtent lorsqu'elle prend la parole, si tendre, si aimante, si rieuse, elle surtout qui déborde d'énergie, de cette énergie qui me fait tant défaut que le doute persiste en moi lorsque je pense à cet amour, que ma raison vacille en me répétant que je ne la mérite certainement pas, malgré les moments inoubliables, intenses, inimaginables, que nous venons de vivre, malgré mon cœur –et mon corps- qui me dit combien elle me plait, tout le temps, et de plus en plus depuis que j'ai entrepris de la découvrir, avec cette façon qu'elle a de me calmer lorsque je suis énervé, de m'exciter lorsque je suis fatigué, de me rassurer lorsque je suis démoralisé, avec le plaisir qu'elle sait me procurer lorsque je devine ses envies, lorsque je connais ses pensées, lorsque je devance ses paroles, bref avec cette complémentarité qu'elle montre et que je n'avais jamais osé imaginer, même dans les rêves les plus fous, même lors de mes longues escapades nocturnes, quand imbibé d'alcool et de lassitude, -à moins que ce ne soit l'inverse-, j'abandonnais mes amis pour partir à la recherche de l'âme sœur, -joli nom pour un amour que je croyais impossible-, et surtout je délaissais ma femme, mon épouse, mon aimée, celle qui m'attendait, inquiète, torturée, tolérant mes infidélités temporaires, sachant parfaitement que ma quête n'était que folie passagère, maladie éphémère, qui guérirait dès mon retour au domicile conjugal, où elle, ma femme, mon épouse, mon aimée, m'attendrait, me pardonnerait, me consolerait d'avoir cru découvrir ailleurs quelque chose, quelque sentiment, quelque fantasme, et qui me ferait éprouver une honte incommensurable, un regret infini, jusqu'au prochain soir,
juste un rendez-vous entre copains, ma chérie, tu sais bien, on boit un verre, on discute de choses et d'autres, et je rentre de bonne heure, promis
à moins que ...
jusqu'à ma prochaine rentrée à la maison, où elle, ma femme, mon épouse, mon aimée, ne m'attendra plus, ne me pardonnera plus, ne me consolera plus, et me laissera une fois, cette fois, cette dernière fois désespérément seul, absolument saoul, et totalement suicidaire.

dimanche 15 mars 2009

Le piège

La porte s'entrouvre. Il sursaute, tourne la tête. Et c'est tout. Pourtant il attend cette ouverture depuis si longtemps. Mais prisonnier de son quotidien fade et finalement rassurant de ses jours qui défilent depuis tant et tant, il peine à réagir. Attendre ? Ou quoi ?
La porte s'entrouvre, juste un peu. Mais qu'y a-t-il derrière ? Aussi il reste immobile, inactif, même pas hésitant. Quitter le gris, le terne, oui bien sûr ! Mais quelle est la couleur de l'autre côté de la porte ? Plus vive, plus éclatante ? Moins ennuyeuse ?
La porte reste entrouverte, pas plus. Alors, quoi ? Tenter une approche, un pas, ou deux. Tendre le cou, pencher la tête, jeter un regard. La curiosité plutôt que l'indifférence. Il n'aperçoit que quelques taches de jaune pâle, ou de bleu clair. Pas de brillance exagérée. Pas de surprise. Pas de risque alors ?
Il pousse la porte. Elle s'ouvre largement, comme une proposition qu'on ne peut plus refuser. Il sort –s'évade- et pénètre dans cet ailleurs inconnu mystère imaginé souhaité mais différent flou apeurant.
La porte se referme. Le pas est franchi. Il est de l'autre côté. Plus de retour possible. Il regarde, observe, cherche ses repères. Il avance à pas lents, il apprend. Il comprend que le piège s'est refermé. Il a franchi une porte, mais pas LA porte. Evasion manquée. Il est encore … !

La porte est close.
Verrouillée. Jusqu'à quand ? Mais le changement, infime, a déclenché quelque chose. Re-naissance. Regain de volonté encore, toujours, qui s'est insinué en lui. Sortir du piège. Vite, avant qu'il ne soit trop tard. Avant d'être une fois de plus englué dans le présent. S'évader à nouveau, pour de vrai. Et ...




... trouver la porte !



mardi 24 février 2009

La vie en questions

Un morceau de vie, ou la vie entière, n'est qu'une suite de questions,
auxquelles nous ne prenons pas toujours la peine de répondre, à temps.

Dis, t'as quel age ? Pourquoi tu veux pas jouer avec moi ? T'habites où ? Tu fais quoi, là ? Est-ce qu'on se connaît ? De quoi parlions-nous ? Qu'est ce que tu bois ? Et après, on fait quoi ? Est-ce que je te plais ? Dis, tu m'aimes ? Alors, tu veux bien ? Tu te décides ou quoi ? Comment c'était ? Pourquoi tu pleures ? Qu'est-ce que tu veux ? Alors, tu m'aimes ? Où on va maintenant ? Tu viens avec moi ? A quoi tu penses ? Pourquoi tu réponds pas ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Pourquoi tu m'as fait ça ? Est-ce que tu te rends compte ? Mais, tu m'aimes ? Et toi, qu'en penses-tu ? Es-tu vraiment sûr ? Comment le sais-tu ? Alors, quoi ? Tu m'aimes ou pas ? C'est oui ou c'est non ? Et ça dure depuis quand ? Tu crois qu'on s'est trompé ? Qu'est-ce tu as à répondre à ça ? Pourquoi tu t'en vas ? Ou tu iras après ? Qu'est-ce que je vais devenir ? Est-ce que c'est pour longtemps ? As-tu pensé à moi ? Tu m'aimes encore ?
Pourquoi tu dis rien ?

Tu m'aimes ?


Dis, t'es mort ou quoi ?

?

dimanche 8 février 2009

dimanche 1 février 2009

Atelier d'écriture

Esquisses, croquis, fragments, des petits bouts de textes qui, peut-être, un jour, deviendront grands, autonomes, indépendants. Voire même une nouvelle, un roman. Un succès ?
J'ai animé mon premier atelier d'écriture, dans un café-lecture, lieu prédestiné. Merci Fabienne !
Moi dont le plaisir à écrire reste immense, comme une libération, comme une explosion, j'ai découvert le plaisir ... de voir les autres écrire. Une idée, une proposition, un fil conducteur et tous se jettent sur le papier. Et j'ai grand peine lorsque je dois les arrêter.
En un mot (euh ... 2) "ça marche !"
Quelques remarques des participants :
transmettre le plaisir d'écrire
laisser sa vie de côté
dérouiller la plume

Bref, une petite fierté, une grande satisfaction, un immense plaisir !

La porte est ouverte...

mardi 13 janvier 2009

VOEUX

Le petit garçon tortille et retortille entre ses doigts le bout du manteau de sa maman. Il s'y est agrippé depuis qu'ils ont pénétré dans la maison. Il a décidé qu'il ne le lâcherait pas jusqu'à ce qu'il en soit parti. Toute la famille est réunie autour des grands-parents. Retrouvailles, embrassades, rires ou larmes. De bonheur évidemment!
La maman, traînant toujours le petit garçon, s'approche de ses vieux parents, les serre contre elle, leur adresse quelques vœux tendres et sincères, bien que mécaniques. Puis fait avancer le petit garçon. Elle le pousse doucement mais fermement vers les deux personnes âgées. Le petit garçon veut rester collé à sa mère. Il ne sait comment repousser, éviter même cet instant qu'il déteste. Il se rappelle bien, déjà l'an dernier, il lui avait fallu embrasser ces visages fripés, ces peaux sèches et rugueuses, se laisser toucher, caresser par ces mains calleuses, presque crochues, après avoir prononcé la formule magique. Il se rappelle son hésitation, son refus, sa colère qui avait duré si longtemps. Il se rappelle tous les regards tournés vers lui.
La détresse de maman.
La honte des cousins.

BO-NA-Né-BO-N'SAN-Té.

Ouf, c'est dit!
Il ferme les yeux, colle deux bisous rapides sur les joues chiffonnées, lâche enfin le bout du manteau de maman, et file fièrement jouer avec les autres enfants.